12/04/2023

Licenciement pour motif économique : Focus sur la notion de dégradation durable et sérieuse de l’excédent brut d’exploitation

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Cass. Soc. 1er févr. 2023, n°20-19.661, FS-B

Dans un arrêt du 1er février 2023, la chambre sociale de la Cour de cassation a apporté des précisions sur l’appréciation des critères susceptibles de fonder un licenciement pour motif économique.

Pour mémoire, un licenciement pour motif économique est un licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non-inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression, d’une transformation ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à : 

 

  • Des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés ;
  • Des mutations technologiques ;
  • Une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;
  • Ou encore la cessation d'activité de l'entreprise.

 

En l’espèce, une salariée employée dans un hôtel en qualité de directrice d’hébergement a été licenciée peu de temps avant la mise en redressement judiciaire de la société.

 

Pour justifier du bien-fondé du licenciement de la salariée, l’employeur s’est fondé sur un motif d’ordre économique, à savoir la dégradation pendant plusieurs années de l’excédent brut d’exploitation (« l’EBE ») de l’entreprise (indicateur permettant d’analyser la rentabilité de l’exploitation d'une entreprise). En l’espèce, l’EBE de l’entreprise était de -726 000 € en 2014, -874 000 € en 2016, +32 000 € en 2016 (après renégociation d’un crédit-bail, une baisse des charges et un apport en compte courant d’associé) et -124 014 € en 2017.

 

Contestant le bienfondé de son licenciement et donc, du motif économique allégué, la salariée a tenté de remettre en cause le motif invoqué par son employeur car selon elle, les difficultés économiques ne peuvent être considérées comme significatives si l’EBE diminue pendant plusieurs années tandis que le chiffre d’affaires généré au cours de cette période augmente. Elle arguait donc de la nécessité de prendre en compte l’évolution des autres indicateurs pour apprécier le bien-fondé d’un licenciement.

Après avoir été débouté de ses demandes par la cour d’appel, la salariée s’est pourvue en cassation, en reprochant celle-ci de n’avoir pas tenu compte de l’augmentation du chiffre d’affaires sur la période considérée. Selon elle, les difficultés économiques doivent être appréciées dans leur ensemble en regardant l’évolution des indicateurs mentionnés à l’article L. 1233-3 du Code du travail.

 

Après avoir rappelé les termes de l’article L. 1233-3 du Code du travail qui requiert, pour justifier le motif économique d’un licenciement, l’évolution significative d’au moins un indicateur économique, la chambre sociale de la Cour de cassation a considéré, au regard des éléments de fait et de preuve qui leurs ont été soumis à l’appréciation souveraine des juges du fond, que la cour d’appel avait pu en déduire, au caractère sérieux et durable de la dégradation de l’EBE, que cet indicateur avait subi une évolution significative. Le licenciement pour motif économique était donc justifié.

 

L’évolution d’un seul des indicateurs, dès lors que le caractère sérieux et durable est retenu, suffit donc à fonder un licenciement pour motif économiques et ce, indépendamment de l’évolution des autres indicateurs.

 

Par Dorian Norindr – Avocat

 

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