03/11/2023

Bonne nouvelle fiscale : Payer des Management Fees pour que le Dirigeant exerce ses fonctions, une option valable !

Image
Le Conseil d’Etat offre une vision innovante concernant les « Management fees » avec la possibilité de rémunérer indirectement un dirigeant, alors même qu’il exerce simultanément cette fonction dans les deux sociétés liées par ce contrat de services. Ainsi la convention de management ne constituent pas nécessairement un acte anormal de gestion dès lors que l’entité versante a entendu, par ce contrat, rémunérer son dirigeant indirectement, malgré le fait que celui-ci soit commun aux deux sociétés.

Les Faits de l'Affaire

L'affaire qui a mené à cette décision est la suivante : Une société A, soumise à l'impôt sur les sociétés (IS), a versé des honoraires à une société B en échange de prestations de management réalisées par un dirigeant commun. Ce dirigeant est également le gérant de la société A, bien qu'il n'y perçoive aucune rémunération. Parallèlement, la société A a conclu un contrat de prestations de services avec la société B, dont le dirigeant est associé et co-gérant.

L'administration fiscale a contesté la déduction de ces honoraires versés à la société B, arguant que ce paiement relevait d'une gestion anormale.

 

La Décision du Conseil d'État

Le Conseil d'État a choisi de s'écarter de la position de l'administration fiscale, ouvrant ainsi la voie à une nouvelle approche. Jusqu'à présent, la jurisprudence considérait que la gestion des fonctions de dirigeant incombait au dirigeant lui-même, et qu'une convention de sous-traitance de ces fonctions avec un tiers était inappropriée.

 

Le Conseil d'État a estimé qu'une société pouvait conclure un contrat de prestations de services avec une autre société, afin que le dirigeant de cette dernière société puisse accomplir des missions relevant des fonctions normalement dévolues au dirigeant de la première société (malgré l’identité des dirigeants). Cette démarche n'est pas considérée comme une gestion anormale, à condition que certaines conditions soient remplies. La société doit démontrer que ses organes sociaux compétents ont réellement souhaité rémunérer indirectement le dirigeant en versant des honoraires pour ces prestations. Ainsi, ce versement n'est pas dépourvu pour elle de contrepartie, le choix d'un mode de rémunération indirect ne caractérisant pas en lui-même un appauvrissement à des fins étrangères à son intérêt. Le Conseil d'État précise que le non-versement d'une rémunération à un dirigeant au cours d'un exercice par une société ne constitue pas une décision de gestion empêchant la rémunération de ce même dirigeant, sur décision des organes sociaux compétents, par le biais d'une autre société.

 

Les Implications pour les Contribuables et les Professionnels de la Fiscalité

Cette nouvelle approche consiste à adopter une perspective pragmatique basée sur une approche économique et réaliste. Elle prend en considération la finalité réelle de ces opérations, visant principalement à rémunérer indirectement les fonctions assumées par le gérant ou dirigeant.

 

De plus, cette solution offre une certaine assurance aux contribuables, réduisant le risque de tomber sous le coup de la notion de rémunération ou d'avantage occulte, susceptible de constituer une distribution irrégulière selon l'article 111, c du Code Général des Impôts, et de voir le rejet des charges pour la détermination de la CVAE.

Mais cette vision des management fees nous questionne toujours concernant certaines situations d’optimisation sur d’autre pans du droit fiscal. Outre la déduction de la charge au sens de l’IS, la qualification de prestation de management fees permet de bénéficier d’une déduction de la TVA pour la société prestataire, et potentiellement d’optimiser les charges sociales sur la rémunération des dirigeants.

 

Quant à son impact sur la fiscalité personnelle, il reste encore des zones d'incertitude, notamment en ce qui concerne la notion d'animation des holdings, les réductions d'impôt pour les PME, ou encore l'abattement sur les plus-values des dirigeants partant à la retraite.

Les suites de cette décision sont donc à surveiller.

 

Conclusion pratique

Pour concrétiser ce schéma de rémunération, il est impératif que la décision de rémunérer indirectement le dirigeant par le biais de contrats de prestations de services soit prise de manière transparente. Il doit être manifeste que les organes sociaux ont clairement eu l'intention, en concluant ces conventions, de rémunérer indirectement les fonctions de direction exercées par le gérant ou le dirigeant dans sa qualité de mandataire social. Si l'information donnée à l'assemblée générale (pour les SARL) ou au conseil d'administration (pour les SA) est suffisante, alors la validation ou l'approbation organisée dans le cadre des conventions réglementées devrait suffire sur le plan fiscal.

 

Cette décision du Conseil d'État ouvre de nouvelles perspectives pour les entreprises souhaitant optimiser leur structure de rémunération, en utilisant des management fees pour rémunérer indirectement leur dirigeant. En surveillant de près les développements ultérieurs et en adaptant leurs stratégies en conséquence, les contribuables et les professionnels de la fiscalité peuvent profiter de cette nouvelle approche pour optimiser leur situation fiscale.

 

Il est recommandé de consulter un expert en fiscalité pour déterminer comment cette décision peut s'appliquer spécifiquement à votre situation et pour garantir une mise en œuvre conforme aux règlements fiscaux en vigueur.

 

CE 9e-10e ch. 4-10-2023 n° 466887, Sté Collectivision

 

Par Noel Boulch – Juriste fiscaliste

Droit fiscal
Optimisez votre fiscalité avec le carry-back 

24/09/2024

Droit des affaires
CAC ou pas CAC ? Point en 2024 sur les règles de désignation des commissaires aux comptes

24/09/2024

Droit des affaires
Le Renforcement des obligations de publicité des opérations de TUP

24/09/2024